ISDR Bukavu et son investissement dans la femme productrice rurale



ISDR Bukavu et son investissement dans la femme productrice rurale

Dans le cadre de la célébration du mois des femmes à l’Institut Supérieur du Développement Rural (ISDR-Bukavu), le nouveau Département dénommé Genre et Développement Durable a organisé, le 22 mars 2018, la conférence sur la thématique nationale retenue par le Ministère en charge du Genre, Famille et Enfants de la République Démocratique du Congo.

Sous la modération du Chef de travaux David BALUKA, deux sous-thèmes ont été abordés, le rôle de l’ISDR-Bukavu à l’investissement dans les femmes productrices rurales, et les milles bras chez les femmes rurales.

Les 108 participants étaient constitués des femmes de l’ISDR-Bukavu, des professeurs et des partenaires locaux dont le Service d’Accompagnement et de Renforcement des Capacités d’Autopromotion de la Femme au Sud-Kivu (SARCAF), l’Association des Femmes de Médias du Sud-Kivu(AFEM), la Radio Universitaire de l’ISDR-Bukavu, MAMA Radio,  Radio SHALA, des étudiants des institutions universitaires en place, les autorités de la section enseignement, le Centre de Recherche et d’Expertise en Genre et Développement (CREGED), le Centre d’Etudes et de Recherches pour la Promotion Rurale (CERPRU) et les Mamans de l’ISDR-Bukavu.

Le premier exposé axé sur : « le Rôle de l’ISDR-Bukavu à l’Investissement dans la force productrice des femmes Rurales », a été présenté par BISIMWA BULANGALIRE KALAMBI, Sociologue et Assistant au Département Genre et développement Durable de l’ISDR-Bukavu. Il a dit qu’en milieu rural, les femmes s’occupent généralement des activités agricoles. L’ISDR-Bukavu forme les Techniciens en Développement Rural qui les sensibilisent et les mobilisent à améliorer leurs productions vivrières et leur bien-être. C’est déjà un investissement de l’ISDR-Bukavu en faveur d’une frange importante de la main-d’œuvre agricole.  Le deuxième investissement de cet institut est la recherche sur les problématiques de genre en milieu rural. Cet institut forme des hommes et femmes qui proviennent des milieux ruraux pour meubler leurs capacités d’intervention dans ces derniers. La création d’un Centre de Recherche et d’Expertise en Genre et Développement contribue par ses recherches et ses formations à l’investissement dans la force productrice des femmes rurales. A ce sujet, l’orateur a montré qu’elles sont en majorité dans les secteurs reproductif et productif mais leur travail reste invisible et moins considérés par les politiques publiques. Les efforts d’investissement dans la force productrice des femmes dans les milieux ruraux rencontrent plusieurs obstacles dont socioculturels, économiques, juridiques, politiques, etc. A titre d’illustration, l’orateur a cité entre autres les mariages et grossesses précoces, l’ambition limitée de jeunes filles à poursuivre les études supérieures, le manque et le faible accès aux microcrédits, la non appropriation des technologies et des innovations, l’interprétation théologique de la vie humaine, les conflits armés, les violences sexuelles, le détournement de fonds alloués aux femmes par les activistes, la mauvaise perception de l’homme par les ONG des femmes, le faible accès aux ressources naturelles, le changement climatique, l’analphabétisme, l’exclusion dans les instances de prise de décision, le manque de confiance entre les femmes, les maladies, etc.

Malgré ces obstacles, les femmes paysannes utilisent et mobilisent plusieurs moyens pour produire dans le secteur agricole. Les stratégies auxquelles elles recourent fréquemment sont  la capacité intellectuelle, la force physique, la terre, le temps, les outils aratoires, l’argent, le troc, la collaboration familiale, etc. Après avoir décrit ces stratégies, l’orateur a fait remarquer que la formation dispensée à l’ISDR-Bukavu était traditionnellement axée sur les problèmes d’organisation sociale, d’administration rurale, de planification régionale, d’environnement et développement durable. La dimension genre était diluée dans ces options classiques. La création de l’option Genre et Développement Durable est un nouvel investissement devant contribuer à réduire les inégalités liées aux rapports des sexes. Cette formation constitue à la fois un élargissement et un enrichissement des Techniciens en Développement Rural par l’introduction de la nouvelle vision de compréhension des problèmes de développement des communautés rurales.  Leurs interventions en milieu rural doivent être soutenues pour qu’ils contribuent de manière efficace aux efforts qui consistent à éradiquer la pauvreté et à combattre les inégalités entre les sexes. Si les inégalités dans les rapports sociaux persistent, il y a lieu que l’échec de la plupart des projets de développement rural demeure aussi. La stratégie adoptée par le Comité de Gestion de l’ISDR-Bukavu de créer le département du Genre et Développement Durable va dans le sens de renverser la tendance mais peut-elle contribuer à la promotion d’une culture du genre et à l’autonomisation des femmes rurales congolaises ?  Les projets de développement rural sont-ils sensibles au genre ? Autant de questions que l’orateur a soumises à l’auditoire.

Le deuxième exposé portant sur : «Les milles bras de la femme rurale », a été présenté par Mme Ir. FURAHA MATENDO Astrid, Chef des travaux et enseignante au Département d’Environnement et Développement Durable.

L’oratrice a expliqué que les milles bras de la femme rurale au Sud-Kivu représentent les différentes tâches journalières exercées par les femmes. Ces tâches sont d’ordre ménager, communautaire, associatif, salarié, commercial et culturel. Toutes ces tâches sont exécutées à la fois par les femmes sans le concours des hommes. Cela permet d’affirmer  que la femme rurale non productrice n’existe pas effectivement. Elle produit quelque chose, peu soit-il, a dit l’oratrice. Malheureusement, cette production de la femme rurale n’est pas comptabilisée par les autorités politiques et administratives du pays. Les secteurs dans lesquels investissent les femmes rurales sont moins considérés par l’autre partenaire et l’Etat congolais. Le budget alloué par ce dernier au secteur agricole est insignifiant. Ceci serait l’une des causes de moindre investissement et de perpétuation de la pauvreté des femmes paysannes.

Enfin, l’oratrice a montré que les milles bras des femmes rurales mobilisent divers moyens pour faire vivre leurs ménages. Parmi ces moyens, la femme rurale effectue au moins 2/3 heures de travail pour produire plus de 50% d’aliments alors qu’elle ne  possède que moins de 2% des terres et qu’elle ne reçoit que moins de 5% des prêts bancaires. Elle ne gagne que 10% des revenus, ce qui fait que 70% des pauvres soient des femmes. Elles assument à 60% la production vivrière et ont accès seulement à 10% des crédits alloués aux petits paysans et à 1 % des crédits affectés au secteur agricole. Ces chiffres confirment la thèse de la féminisation de la pauvreté. Les problèmes spécifiques des femmes s’étendent à la santé reproductive et touchent les travaux ménagers, champêtres et les petits commerces. Si ces différents aspects ne sont pas intégrés dans une politique d’autonomisation des milles bras de la femme rurale, ils peuvent constituer un obstacle majeur au développement rural durable égalitaire et inclusif.

Pour intéresser les étudiants davantage, les participants ont proposé à l’ISDR-Bukavu de créer un Club de Réflexion et d’Echange sur les thématiques transversales du Genre qui sera animé par eux.

Conférence/Dép.Genre et Dév.


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